"Dans l’exemple ci-dessous, ne pourrions-nous pas considérer le degré VII de la 3ème mesure comme un second degré minoré, donc sixte napolitaine, et accord cadentiel de La Majeur... ?"
Non, il ne s’agit pas d’un second degré minoré, mais d’un accord VIIa dont la note si est chromatisée [1]. Nous aurions pu également analyser cet accord comme IV de ré mineur avec sol comme note chromatique. Il s’agit en effet d’une double sensibilisation de la dominante.
"Cet emploi d’une "double sensible" dont vous parlez me semble correspondre à quelque-chose que j’ai lu il y a quelques années dans le traîté d’harmonie de Schoenberg : On aurait ici, si je me souviens bien de ce que dit Schoenberg, une "transformation du 2nd degré" dans la cadence : en ré mineur, le second degré est mi-sol-sib. La transformation consiste alors à ajouter une 7ème (ré) , omettre la fondamentale (mi), augmenter la tierce (sol qui devient sol#, sensible de "la" comme vous l’avez précisé ), ce qui donne : sol#-sib-ré. (auquel peut-être aussi ajoutée une 7ème mineure, ce qui donne alors : sol#-sib-ré-fa). Et de mémoire, cet accord serait souvent suivi du premier degré en second renversement, puis dominante en F, et enfin 1er degré... "
Ce que décrit Schoenberg correspond aussi à cela, avec une réserve toutefois : l’accord II7 sans fondamentale est aussi un accord IV. Il est donc plus simple de le considérer comme un degré IV.
C’est un enchaînement classique très fréquent à partir de Haydn. On en trouve d’autres exemples dans les sonates de Mozart et de Beethoven. Dans cette même sonate de Mozart, à la fin du 3ème commentaire de l’exposition, il est analysé comme un accord IV dont la fondamentale est chromatisée vers la dominante.
Dans la sonate en fa mineur de Beethoven, à la fin du 1er commentaire du développement, on trouve ce même accord avec une 7ème cette fois. Dans ce cas, il s’agit d’un accord VII7a de fa mineur, dont la tierce sol est chromatisée vers la dominante fa de sib mineur (comme l’exemple de Mozart ci-dessus). Les deux sensibles de la dominante sont dans cet accord : solb et mi bécarre.
On retrouve le même enchaînement, toujours dans cette même sonate de Beethoven, huit mesures plus loin fa#-lab-do (IV de do mineur >sol-si-ré (V de do mineur). Fa# et lab sensibilisent sol. A noter que Beethoven complexifie l’accord avec une double appogiature. Il y a d’autres exemples dans ces sonates que nous étudions, car cet enchaînement est couramment employé.
Le procédé le plus simple pour retenir cet enchaînement est de le considérer comme une succession IV-V avec une chromatisation de la fondamentale de IV.
[1] "Je possède quelques traités d’harmonies américains qui le dénomme accord de sixte augmentée (augmented sixth chord). Ici l’arrivée sur la dominante "la" (en ré mineur) est intensifiée par deux sensibles : l’une inférieure (sol#) et l’autre supérieure (si bémol). Ces deux sensibles superposées forment un intervalle de sixte augmentée (sol#-si bémol). C’est un accord très fréquent en musique classique, je crois qu’il est plus rare chez Bach et ses contemporains." Cédric G.