Il n’y a pas que l’année qui est nouvelle pour Didier Ledan, pianiste et compositeur issu de nos bancs. Avec son collaborateur et ami Joseph Refalo, ils ont ensemble renouvelé leur société "ACE musique", leurs régies, et jusqu’à leur site qui change d’adresse, pour devenir "PROJET 10-4.COM". Celui-ci présente plusieurs nouvelles compositions originales, orientées "longs métrages", ce qui nous a donné l’occasion d’échanger quelques mots avec Didier à ce propos... Lire l’article
Depuis 1990, Didier travaille en collaboration avec son ami Joseph Refalo sur des séries animées : "Caroline et ses amis","Tom & Sheenah", "Norman normal", "Titeuf", "Inami" (à relire : le focus ... Sur Didier LEDAN).
Leur site présente des musiques aux atmosphères travaillées et envoûtantes : tour à tour précieuses, fantastiques, inquiétantes, grandioses... elles méritent à merveille l’appellation de "musique à l’image" par le renforcement incontestable qu’elles leur procurent. On est transporté par une cavalcade en plein XVIIIème, aux étendues désertiques du far West, en passant par la fiction de cimetières noctures ou encore la féérie des forces de la nature... 7 titres à écouter sur PROJET 10-4.
A propos Didier, pouvez-vous nous dire quelques mots de votre nouvelle orientation : la musique de long métrage ?
Je ne sais pas si on peut parler de "nouvelles orientations", concernant le long métrage. Nous faisons avant tout de la musique… Mais il est vrai que le travail pour la musique de fiction nous a toujours passionné. Notre parcours jusqu’à présent est marqué par le dessin animé. Même si nous avons fait quelques productions musicales dans d’autres secteurs, il semble que de fait, nous soyons "catalogués" compositeurs pour l’animation. Pourtant (et ce n’est pas à Polyphonies que j’apprendrai cela ;-)), écrire de la musique pour de la chanson, du film, du théâtre…demande toujours de nombreuses techniques communes.
Le métier de compositeur reposant beaucoup sur la connaissance de réseaux, il devient alors difficile de passer d’un secteur musical à un autre. Cela reste un secteur difficilement accessible sans les bons contacts. Aujourd’hui, nous cherchons donc à faire connaître notre travail "orienté long métrage", et c’est pourquoi nous avons mis en ligne ce nouveau site, présentant des compositions qui pourraient se prêter à de la fiction (films ou téléfilms). Nous proposerons régulièrement de nouvelles créations.
Les extraits choisis sont très impressionnants, autant dans leur rendu musical, que leur technique sonore ! Il faut un super matériel pour tout ça ! Qu’est-ce que vous privilégiez : le son ou l’écrit ?
Merci pour les compliments ! Il faut les 2 : l’écriture, et le son. Avec un véritable orchestre, il faut de bons musiciens, un bon chef d’orchestre, une bonne prise son, et un bon mixage (surtout en musique de film où la multiplication des micros est de rigueur).
Dans l’utilisation de banques de sons, il en est de même. Il en faut de très bonnes (et il y en a de plus en plus). Ces banques demandent un certain apprentissage. Si les grands principes d’utilisation restent les mêmes, chaque banque peut demander une certaine pratique afin de pouvoir les utiliser de manière optimale.
Le mixage est une étape également essentielle, sachant qu’en plus d’un mixage "classique", il faut la maitrise et l’expérience de différentes techniques (corrections, placements…) pour un rendu le plus réaliste possible (même si un véritable orchestre reste irremplaçable…).
Le matériel, hormis les banques de sons, doit être lui aussi de qualité. Il est illusoire de penser que l’on peut sortir comme disent les anglos-saxons "out of the box", directement de l’ordinateur, un très bon mix orchestral. Le mixage de banques de sons nécessite, entre autre, l’emploi de matériels de traitement du signal externe. Beaucoup de grands compositeurs de musique de films actuels travaillent de cette façon pour réaliser leur maquettes de travail, en vue d’un enregistrement ultérieur avec un véritable orchestre, ou non...
Et une question sensible : pour vous, quel avenir pour le métier de compositeur ?
La question de l’avenir du compositeur, s’étend finalement au delà de cette seule profession. L ’industrie audio-visuelle dans son ensemble connait déjà depuis quelques année des bouleversements. Le cinéma rencontre à l’échelle mondiale, une forte baisse de fréquentation depuis plusieurs années (à l’exception des États-Unis). Ce dernier subissant également la concurrence du jeux vidéo…
Celle du disque a fortement chuté depuis 1999 (elle aurait néanmoins connu une très légère reprise en 2012…) . Point positif en revanche, est l’augmentation des ventes de musique en ligne qui viendrait pour certains contrebalancer la perte des ventes physiques de disques. De plus, on constate que ces nouveaux modèles légaux offrent une meilleure expérience à l’utilisateur, que le piratage...
Une autre inquiétude concerne les droits d’auteurs (compositeurs, mais aussi scénaristes, réalisateurs…), qui subissent de plein fouet cette mutation. La mise en place de système de rétribution par les fournisseurs d’accès internet est, actuellement, loin de compenser les pertes inhérentes aux nouveaux usages de consommation d’œuvres audiovisuelles (d’autant plus que, crise oblige, les budgets s’assèchent eux aussi..). Et de plus en plus de producteur cherchent à acquérir de la musique originale en "buy out", libre de tout droit.
Il est certains que nous vivons une époque charnière dans tous ces domaines. Même si, pour le "consommateur final" de film, de musique, etc, les effets ne se font pas encore sentir, on risque d’assister, si le "virage" n’est pas négocié correctement, à un appauvrissement de la création. Voilà comment sont vues les choses de notre côté ;-)
A bon entendeur !...
Merci Didier pour votre aimable participation