"Chacun possède, depuis l’enfance, une connaissance orale de la musique. Malheureusement, cette connaissance s’arrête à un stade primitif. On invente des sons de plus en plus inouïs (sur les nouveaux comme sur les anciens instruments), mais on oublie souvent le message." Cette constatation est faite par Jean Robert pour une association que les élèves de Polyphonies connaissent bien, puisqu’il s’agit de notre "maison mère" en quelque sorte ; les ACM, qui ont développé l’école de composition d’Ivry s/Seine (94) depuis 1987.
Aujourd’hui fermée, nous relayons maintenant cette école et transmettons à notre tour cette pédagogie remarquable. Il nous a paru important que l’esprit qui l’anime soit présent dans notre Mensuel, pour être partagée par vous tous, anciens et nouveaux élèves ! Pour ceux qui ne nous connaissent pas encore, POLYPHONIES est une école d’écriture et de composition à distance, présente sur le web depuis 1999.
Généralement nous sommes victimes d’un à priori très fort vis à vis de la musique : L’art musical est du domaine des spécialistes. Or nous possédons tous, comme l’enfant, les rudiments d’une pensée musicale occidentale, orientale ou africaine, etc. Ces rudiments nous permettent non seulement de retenir une chanson, un air plus ou moins complexe, mais également de fredonner n’importe quoi selon notre inspiration. Malheureusement nous ne prenons pas au sérieux ce "n’importe quoi".
Pourtant, ce "n’importe quoi" a tout autant d’importance que les premiers balbutiements du bébé. On ne pense pas qu’improviser, chercher des notes sur une flûte ou un piano soit digne d’intérêt. Alors que c’est le point de départ de la communication.
Le plus souvent, l’apprentissage du langage musical s’arrête à ce stade primitif. Il peut aller plus loin chez les plus sensibles ou les passionnés de l’audition, mais chez ces artistes l’art musical reste au stade oral, comme dans les sociétés primitives qui transmettaient de bouche à oreille les coutumes, traditions, et culture.
Il est évident que cette richesse culturelle a été bien mieux conservée et transmise à partir du moment où l’homme a développé la faculté de l’écrire, sur la pierre ou sur le parchemin. Mais, par le pouvoir de l’écriture, les scribes ont en définitive retenu ce qu’ils voulaient de la manière dont ils le voulaient : à partir des significations les plus hautes et les plus indispensables à la vie culturelle de leur pays, ils ont développé une création de plus en plus personnelle.
Aujourd’hui, dans la société occidentale, nous sommes, au niveau musical, exactement à ce stade oral : seuls les spécialistes - sortis des conservatoires avec diplômes et habilitations - ont accès à la richesse du patrimoine, dont ils apparaissent comme garants de la conservation. Et les non-spécialistes sont livrés à une transmission orale de la culture musicale, le plus souvent déformée par les intérêts mercantiles. Où sont l’éveil personnel à la création, l’invention, l’improvisation ? Comment retrouver la source de la vraie communication musicale ? L’art de communiquer en musique suppose un langage à la fois toujours renouvelé, pour exprimer les émotions propres à chaque compositeur, mais également suffisamment conventionnel et commun (au sens de partagé par la communauté) pour être compris et transmis. C’est toute la problématique de la création musicale aujourd’hui. On invente chaque jour sur les synthétiseurs et ordinateurs des sons véritablement inouïs, c’est à dire jamais entendus auparavant mais on se perd souvent dans les subtilités auditives au détriment du message musical.
Quand trois notes de Mozart suffisent à combler l’être qui les reçoit pendant des semaines, on peut se demander si chacun ne s’intéresserait pas davantage à la musique, la vraie, celle du cœur, si les créateurs utilisaient un langage le plus communicatif possible. Si l’on continue a faire des chansons dans le tissu des accords dits classiques, c’est bien parce que l’on ne change pas la culture d’un peuple (le marketing dirait " les masses " ) par la simple volonté d’un compositeur, si génial fût-il. Il y a des éléments mélodiques, harmoniques et rythmiques rajeunis par le jazz, le rock ou la techno qui sont inscrits dans l’inconscient de chacun et qui font de la musique un langage qui passe.
Tout ce préambule pour dire la nécessité pour celle et celui qui veulent composer, d’acquérir ces éléments traditionnels de la musique, ne serait-ce que pour comprendre l’univers des grands compositeurs, mais surtout les sources fondamentales de la chanson populaire. C’est aussi le tremplin indispensable pour entreprendre sa propre recherche.
Nous travaillons donc dans nos cours les techniques classiques, en insistant sur le pouvoir de l’écrit : en écrivant j’accède à la réflexion, à la distanciation, à la critique, à la mémoire aussi. réflexion et intelligence que le travail sur instrument ne permet que très difficilement. Et surtout, l’écriture oblige à s’arracher des habitudes acquises sur l’instrument par les doigts, la main, la bouche, et l’oreille, pour amener une véritable intériorisation de la création musicale.
L’écriture musicale traditionnelle n’a rien de statique, c’est un langage qui a évolué et qui continue d’évoluer, comme tout langage vivant. Les sept notes de la gamme, héritage des Grecs n’ont pas toujours été jouées ni perçues comme elles le sont aujourd’hui. Il est donc nécessaire d’effectuer un retour aux sources pour comprendre les toniques musicales, non pas en termes de science acoustique, mais dans ce qu’elles représentent en termes de mouvement.
On croit facilement qu’une mélodie est le fruit unique de l’inspiration (divine de préférence) ou de n’importe quoi. Nous allons voir, au contraire, que le moindre fredonnement occidental répond en fait à des structures très précises. Ce que l’on croit spontané - comme le langage de l’enfant de quatre ans - est en réalité, ce qui est le plus lié à la mémoire collective et à la culture environnante.
Il faut d’abord connaître l’espace, le terrain le milieu dans lequel va cheminer la mélodie. C’est tout autre chose que de " savoir ses notes ". C’est le lieu de la Modalité et de la Tonalité. Ce lieu est autant rythmique que sonore.
La note est un son précis doté d’une vie rythmique. Rythme physique d’abord puisque le son est produit par un choc vibratoire. Mais surtout rythme symbolique, puisqu’on donne à la note une pulsion qui a valeur de représentation d’un mouvement intérieur, ou d’un état psychique.
La pulsion est à la base de la vie physique et mentale : Elle est constituée de deux moments, le moment de tension et le moment de détente. Comme un cœur qui bat, la Tension-Détente est la définition même de toute la vie sur Terre. Et le geste du chef d’orchestre ne fait que la signifier, la construire musicalement comme la voix qui ondule ou l’archet qui vibre. Remarquons qu’il ne s’agit pas de confondre le rythme-pulsion avec la métrique. La " mesure " qui n’est qu’une notation commode du temps que met la Tension ou la Détente à vivre.
Le solfège présente souvent les structures modales et tonales comme une suite de gammes théoriques, élaborées de façon totalement intellectuelle, tels des axiomes mathématiques. Or, ces structures musicales se sont construites très progressivement au cours du temps, et ont évolué jusqu’au système que nous connaissons aujourd’hui, lui même appelé à évoluer.
Ces structures se sont construites sur la cadence, dont la signification est d’abord rythmique.
" Cadere " en latin signifie " tomber ". Et le mode indique la chute de la Dominante sur la Tonique, après qu’elle s’est tendue dans sa direction ; autrement dit, le cheminement de tout ce qui vit d’un point de départ central vers l’extérieur, puis retour au centre, constitue le fondement de toute création musicale.
C’est sur ces bases aussi évidentes que méconnues que nous allons construire une mélodie.
Autre notion introduite dans le cours de Mélodie : La Note-pivot. C’est elle qui charpente chaque mode, dons une tonalité donnée, en deux structures : celle de l’équilibre notée A où les notes-pivot correspondent aux notes de l’accord (par exemple en tonalité de Do Majeur, la structure de l’équilibre prend pour notes-pivots Do, Mi et Sol) ; et celle du déséquilibre, notée B, où les notes-pivots vont être les notes complémentaires de l’accord (toujours dans l’exemple de Do Majeur, la structure B prend pour notes-pivots Ré, Fa La et Si). Dans la mélodie populaire, ce jeu d’équilibre/déséquilibre est présent constamment.
Nous apprendrons à placer les notes-pivots et les autres (notes non-pivots) dans la cellule rythmique où nous définirons le " Posé " et le " Levé ", comme points l’équilibre et de déséquilibre, à l’image du pied qui se lève et se pose pour " battre la mesure ". Nous examinerons plusieurs formules :
D’abord, en ne prenant que les notes-pivots de l’équilibre (A) ou du déséquilibre (B) on découvre les messages de :
Répétition : Message musical primitif représente la vie en train de naître ou de mourir.
Affirmation : Message de l’activité simple, que l’on retrouve par exemple dans les marches militaires.
Ces messages reviennent toujours au repos définitif, Posé final (sans Levé).
Ensuite, en ajoutant les notes non-pivots, que ce soit dans l’équilibre (A) ou le déséquilibre (B), et en jouant sur le placement au Posé ou au Levé, nous entrons dans des messages plus élaborés, à l’aide de notes fonctionnelles :
Tournoiement : Mouvement qui revient à la même place, où nous examinerons l’expression des broderies et l’appoggiature (représentation de l’effort).
Dynamique : Mouvement qui nous emmène vers un autre point un autre pivot par l’utilisation de notes de passage et d’anticipations.
Face à ces principes fondamentaux de la mélodie, nous verrons que la plus ou moins grande rapidité (longueur métrique des notes de la ronde à la triple ou quadruple croche) n’apporte qu’un message secondaire.
Remarquons que ces messages existent aussi dans des musiques éloignées de nos structures occidentales (que ce soit dans les cultures primitives, la musique orientale, etc.), et également dans les créations très modernes où les objets sonores complexes tendent à remplacer les notes-toniques traditionnelles.
Ceci n’est bien sûr qu’une indication pour éveiller la curiosité, mais ces éléments, aussi simples qu’ils paraissent, se trouvent à la racine du langage musicale et sont fondateurs de l’expression humaine. Nous verrons comment les formules se complexifient depuis la comptine enfantine jusqu’aux mélodies les plus élaborées des grands compositeurs.
Et le solfège, dans tout ça ?
Les exercices d’écriture feront acquérir, si on ne les a déjà, les techniques traditionnelles : barre de mesure, métrique, tonalités , chromatismes... Aucun niveau minimum n’est requis, et nous avons plusieurs exemples d’élèves venus au premier cours sans même connaître l’ordre des notes de la gamme.
Polyphonies diffuse en exclusivité ces techniques d’écriture mélodiques : cours de mélodie de POLYPHONIES
L’harmonie à trois, quatre ou cinq sons superposés est une technique beaucoup moins difficile qu’on ne le pense.
Notre approche consiste à ne pas mélanger aux règles d’harmonie les problèmes mélodico-rythmiques, ni à plus forte raison contrapuntiques. Nous ne faisons pas non plus de l’harmonie un fourre-tout de tous les styles classiques, depuis Bach jusqu’à Ravel. Encore moins un catalogue de recettes pour écrire dans telle forme du XVIIe ou XVIIIe siècle. Refaire l’accompagnement d’une mélodie de Schubert n’est pas forcément très pédagogique... Et si j’aime écouter Debussy ou Mozart ce n’est pas à cause des accords qu’ils utilisent mais parce qu’ils transmettent un élan vital admirable, exprimant une vie intérieure hors du commun qui me pousse à découvrir ma propre sensibilité.
Si l’harmonie est utile pour une audition verticale de la polyphonie, elle peut s’avérer désastreuse pour la création musicale lorsqu’on la fige dans des formules consacrées, comme un mauvais livre de recettes. Par conséquent notre enseignement amènera à manipuler et maîtriser des formules d’accords, mais surtout dans l’optique de bâtir une structure soutenant la mélodie, et de donner les premiers rudiments de la polyphonie, qui nous amènera aux techniques du contrepoint. Car ce qui est le plus important dans la musique, ce sont les mouvements, c’est à dire les directions architecturales des mélodies dans leurs relations polyphoniques.
Polyphonies poursuit cet enseignement de l’harmonie : cours d’harmonie de POLYPHONIES
A l’issue de la première année qui nous aura donné les éléments techniques du cheminement mélodico-rythmique , nous appendrons à écrire, à partir d’une cellule mélodique que nous appellerons " schème ", de réels développements de thèmes et mélodies.
Un " schème " se développe essentiellement par imitation, c’est à dire par reproduction à différentes hauteurs, et avec toutes les transformations qu’il est possible d’imaginer : Imitation semblable, imitation contraire, imitation rétrograde, en augmentation, en diminution, en extension, en réduction...
Puis en variation, variation libre mélodique, variation libre rythmique... Les imitations pourront ensuite se faire en canon à deux trois ou quatre voix (après l’étude du contrepoint). Tout ceci n’étant pas le fruit du "n’importe quoi" ou de l’inspiration, mais s’élaborant à partir d’un travail artisanal aux gestes très précis, où les outils sont le papier à musique, le crayon et la gomme, et surtout l’imagination créatrice.
Ensuite est abordée la construction du thème : A partir d’un schème développé succinctement puis d’un commentaire (développement court), et d’une coda, on construit une structure mélodique complète :
Thème = Schème + Commentaire + Coda
Parallèlement l’apprentissage de la rythmique suit le développement mélodique : la cellule rythmique de base, et "Posé-levé" se combine en rythme complexe, " Elan-Repos ", puis en grand-rythme, qui nous amène à la prise de conscience de la " Tension-détente " d’une phrase musicale entière, puis d’une page ou d’un morceau dans son ensemble.
Polyphonies diffuse en exclusivité ce travail sur le schème, le contre-schème et le thème : cours de schème de POLYPHONIES
Point contre point, " ponctum contra punctum ", c’est tout l’art d’écrire une note (un point sur la portée) en face d’une autre note. Ce terme, venu tout droit des techniques de chant grégorien du Moyen-Age, désigne encore aujourd’hui le jeu des mélodies superposées de la polyphonie. Il ne s’agit pas ici de doubler bêtement une voix à la tierce ou à la sixte, mais d’établir des mouvements et des directions qui apportent un contraste et une complémentarité entre les parties, dans la véritable dialectique des intervalles consonants et dissonants.
A partir des mouvements simples : Parallèle, Contraire, Oblique, on construit les mouvements complexes :
Contraste-contraire
Contrasté-parallèle conjoint
Semblable-contraire conjoint ou disjoint
Semblable-parallèle conjoint
Dès lors, les rapports mélodiques, harmoniques et rythmiques se mélangent et se superposent comme, selon Jean-Sébastien Bach, " les paroles de plusieurs personnes échangeant leurs idées dans une conversation de bonne compagnie ".
Les exercices
Ils se font toujours exclusivement par l’écriture, en clef de Sol et de Fa (nous laissons les clefs d’Ut joyeusement de côté car elles n’apportent rien à la compréhension des mécanismes), en commençant par deux lignes superposées puis trois, puis quatre. A la Renaissance on allait parfois jusqu’à 43 ! L’apprentissage du contrepoint demande persévérance et patience, un peu comme le tissage appliqué à la musique... Mais il donne accès à une véritable maîtrise de la création musicale : en effet, dans le domaine de la composition, l’essentiel n’est pas " d’avoir de l’oreille " ou " le sens du rythme " , mais d’éprouver un mouvement puis de le distancier, de le théâtraliser, afin de l’incarner dans des codes sonores élaborés par le travail des techniques traditionnelles. Nous engageons d’ailleurs les élèves à inventer d’autres codes - assez simples tout de même pour être compréhensibles par l’auditeur - dans la recherche architecturale de nouveaux objets musicaux.
Les cours de contrepoint sont également enseignées à Polyphonies : cours de contrepoint de POLYPHONIES
Bien que la composition ait déjà été abordée par bribes dans les exercices mélodiques et polyphoniques des deux premiers niveaux, elle prend à partir de ces cours une véritable forme, suivant un plan plus ample, en passant du niveau de la phrase à celui du paragraphe puis du chapitre, puis du livre... En composition. nous utilisons bien sûr d’autres mots pour désigner ces différentes narrations musicales.
Voici quelques plans employés traditionnellement, et qui seront utilisés par l’élève dans une progression de complexité :
Le thème et ses variations : Chaque variation apporte une nouvelle expression ou un nouveau message.
Le plan-chanson : Refrain et couplet, deux thèmes qui alternent très simplement.
Le plan-danse : Allemande, Gigue, Menuet, telles qu’on les trouve dans les suites de Bach, Couperin, Rameau...
Le plan-prélude : Thème dont le commentaire est développé l’espace d’une petite pièce formant un tout.
Le plan-sonate : Tiré du précédent mais enrichi d’une exposition à deux thèmes, suivie d’un développement sur des fragments du thème ou de son commentaire, et terminant par une réexposition des deux thèmes.
Le plan-fugue : Forme la plus riche mais aussi la plus fabriquée, elle rassemble toutes les techniques du contrepoint des imitations et du canon. Le thème devient un sujet ; le commentaire se superpose au thème et se nomme contre-sujet ; les mini-développements s’appellent divertissements ou strettes, avec une coda en pédale...
Enfin, l’art du récitatif, lieu de rencontre entre musique et parole, rencontre au sens parfois d’une véritable étreinte, révélateur de toute l’humanité des grands compositeurs.
Par l’étude de ces plans classiques, magnifiés par tous les maîtres. l’apprenti-compositeur forme son esprit à la logique des idées musicales, aux enchaînements et aux développements.
Découvrez notre enseignement de la composition : cours de composition à distance POLYPHONIES
De l’instrumentation
Un instrument ne se connaît bien que par la pratique. En effet seul l’interprète connaît les contours et détours de son instrument ses possibilités, ses limites (que l’on repousse d’ailleurs sans cesse). Mais le compositeur peut arriver à connaître intellectuellement un instrument pour savoir quel parti en tirer dans ses œuvres. Wagner, qui ignorait l’exercice d’un instrument (à part peut-être le piano qu’il connaissait suffisamment pour déchiffrer ce qu’il écrivait directement sur papier), fut néanmoins un génial orchestrateur.
Le compositeur peut apprendre à utiliser un instrument par la connaissance de sa tessiture, des hauteurs où il sonne le mieux, des possibilités ou impossibilités de sa facture, de sa matière (bois, métal, etc.), du frottement de l’archet ou du souffle... Il n’est pas interdit non plus de recourir aux lumières de l’instrumentiste, pour vérifier si tel ou tel effet recherché par l’écriture correspond bien à la réalité sonore.
Nous essayons, dès le début de l’apprentissage et tout au long du cursus, de fabriquer une phrase pour un instrument déterminé : la voix d’abord, qui permet au mieux d’appréhender la notion d’effort dans la production du son, puis l’ensemble des instruments classiques. Cela permet d’entendre la mélodie dans les difficultés concrètes de son interprétation, mais aussi de percevoir les possibilités d’intervalles et de rythmes de la mélodie elle-même.
A l’orchestration :
L’orchestre ne se réduit pas à un ensemble d’instruments différents et complémentaires. Il peut devenir un véritable méta-instrument presque un organisme vivant où les mélodies, harmonies, polyphonies et rythmes se mélangent et se rejoignent comme les couleurs d’un tableau. L’analogie avec la peinture constitue d’ailleurs un excellent soutien pour l’imagination orchestrale, surtout si l’on ajoute à l’aspect visuel le sens du toucher, qui traduit le grain de la toile sur laquelle on peint, c’est à dire la " matière sonore " particulière à chaque instrument...
Une étude chronologique des pratiques orchestrales amène l’apprenti-compositeur à découvrir comment les instruments ont été progressivement incorporés dans un tissu orchestral et sonore. Si les instrumentations des XVIIe et XVIIIe siècles gardaient à chacun sa couleur originale, comme dans un vitrail, les orchestrations de Berlioz, Malher, Debussy, (entre autres) font, à l’instar de l’impressionnisme en peinture, perdre aux cordes, bois et cuivres leurs caractères individuels pour trouver des associations toujours nouvelles de timbres, dans des saveurs sonores inconnues jusqu’alors.
Puis, la recherche sonore étant un continuel changement un compositeur comme Stravinsky s’efforcera de retrouver et d’accentuer le caractère spécifique de chaque instrument. C’est enfin la découverte d’un tout autre univers par le retour au bruit non mesurable, dans la musique dite concrète, puis l’emploi de sons fabriqués électroniquement même si ces nouveaux sons et traitements sont pu encore trop récents pour qu’on puisse les appréhender méthodiquement dans une pédagogie de base... On le voit l’instrument classique est donc loin d’avoir épuisé toutes les possibilités de matière et de forme !
Extrait de la brochure pédagogique des ACM Ivry (1990)