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Harmonie : la cadence sous plagale III-I

"Mr Loujine" a soulevé une intéressante question sur le forum des élèves "Dans l’aide aux exercices du cours 26, j’ai été surpris de voir la cadence IIIa - Ia dans le premier exemple. Mais, je me suis dit que si elle se trouve là, c’est qu’elle a certainement sa raison d’être. Aussi, je me demandais si cet enchaînement IIIa - Ia est considéré comme une cadence, ou bien comme une progression harmonique ? Et quelles sont ses conditions d’utilisations en tant que cadence ?

Lire la réponse

L’enchaînement IIIa-Ia est une cadence sous-plagale au même titre que l’enchaînement III-I. Le qualificatif "sous plagale" nous indique que l’effet cadentiel [1] y est moindre encore que dans la cadence plagale, pourtant déjà faible. C’est la raison pour laquelle en composition, cet enchaînement sera peu employé comme fonction harmonique cadentielle. Mais il s’agit bien quand même d’une cadence, et nous pouvons l’utiliser en cours d’exercice d’harmonie pour accroître les possibilités d’enchainement, en évitant toutefois de l’utiliser en fin de parcours, puisqu’elle n’a qu’un très faible caractère conclusif.

Il faut garder en mémoire que c’est la relation entre les degrés qui détermine la cadence. La position ou le renversement des accords atténuent ou renforcent l’effet cadentiel mais ne la déterminent pas.

La cadence repose avant tout sur la relation des degrés à la tonique, au sein même du mode.

Historiquement d’ailleurs, l’élaboration d’accords sur les degrés du mode s’est produite dans un second temps. Les cadences structuraient déjà les antiennes [2] et les cantiques de plain-chant [3] bien avant que les premiers accords à 3 sons n’harmonisent une mélodie.

ENCHAINEMENTS CADENTIELS DANS LE MODE MAJEUR

La tonique est la position de repos dans le mode. A chaque fois qu’un degré effectue un retour à la tonique se produit un effet de repos, de détente. Selon les degrés et les modes, l’effet sera plus ou moins important. Dans notre mode majeur (ou son dérivé le mineur harmonique), nous le percevons dans les enchaînements harmoniques suivants (par ordre décroissant d’intensité) :

CADENCES CONCLUSIVES

  • V-I : cette relation produit l’effet conclusif le plus frappant, d’où le nom de cadence parfaite .
  • VII-I : l’articulation est également très marquée dans le mode majeur, car elle repose sur la relation sensible-tonique .
  • IV-I : Les relations cadentielles s’atténuent ensuite, avec la cadence plagale . C’est une succession sous-dominante-tonique, qui s’emploie parfois après la cadence parfaite authentique pour en renforcer l’effet. Mais elle est peu employée comme articulation cadentielle en composition.
  • III-I : vient la cadence sous-plagale , très peu conclusive.
  • II-I et VI-I, l’effet cadentiel de ces deux enchaînements est inexistant. C’est la raison pour laquelle on les appelle des fausses-cadences et que l’écriture classique les ignore dans cet emploi.

Cependant, deux autres enchaînements sont dits cadentiels, bien qu’ils ne reposent pas sur la relation à la tonique. N’amenant pas de repos, ce ne sont donc plus des cadences conclusives.

CADENCES SUSPENSIVES

  • sur le degré V : quand la phrase s’achève en suspens sur la dominante. C’est une cadence imparfaite ou demi-cadence . (De même, dans la chanson "Malbrough s’en va-t-en guerre" la fin de la ritournelle Ne sait quand reviendra !...)
  • V-VI : et enfin, la cadence rompue consiste en un enchaînement entre le Ve degré et VIème degré, alors que l’on attend le Ier degré. C’est pour cela qu’on l’appelle aussi cadence évitée .

On observera que lors d’un enchaînement V-I ou V-VI, nous ne sommes pas en suspens après l’accord V, puisque celui-ci est suivi de I ou de VI. Ce degré V ne génère donc pas de cadence imparfaite.

Nous voyons dans nos cours d’harmonie comment les cadences ponctuent le discours musical. Dans le cas qui nous occupe, III-I serait une ponctuation moins forte que le point final V-I de la cadence parfaite, moins que le point-virgule IV-I de la cadence plagale, et moins encore que le point d’interrogation ou les trois points de suspension, si peu conclusifs de la cadence imparfaite sur V. Le symbole de la virgule semble le mieux lui correspondre.

Terminologie des cadences

Concernant les deux cadences, la cadence parfaite et imparfaite, notre terminologie diffère de celle que l’on trouve dans les traités français, pour se rapprocher de la terminologie anglo-saxonne. Ce choix pédagogique a été fait par Jean Robert en fonction d’une utilisation réelle et pratique des cadences en composition, et que l’on retrouve aussi dans les analyses des œuvres. Notre distinction entre cadence parfaite et imparfaite correspond précisément à la manière dont elles structurent le discours musical. Elle repose sur le principe que c’est la relation entre les degrés qui détermine la cadence et non la position ou le renversement des accords qui ne font qu’en atténuer ou renforcer l’effet.

Terminologie des cours de Polyphonies :
- Cadence parfaite : phrase s’achevant par V>I : détente - conclusive
- Cadence imparfaite : phrase s’achevant par V = tension - suspensive

Dans les traités français :
- Cadence parfaite : phrase s’achevant par V>I avec les deux accords en fondamentale
- Cadence imparfaite : phrase s’achevant par V>I avec un des deux accords en renversement
- Demi-cadence : phrase s’achevant par V

Dans les traités anglo-saxons :
- Cadence authentique, cadence standard ou cadence fermée : phrase s’achevant par V>I. Elle est parfois subdivisée en cadence authentique parfaite et cadence authentique imparfaite.
- Cadence imparfaite, demi-cadence, ou cadence ouverte : Phrase s’achevant par V

LIENS CONNEXES

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Notes

[1] Une cadence est une succession de degrés (mélodique ou harmonique) donnant le sentiment d’un repos dans la phrase musicale, d’une "chute" du discours ("cadere" = tomber)

[2] Refrains assez simples alternant avec des versets de psaumes (antiphonie). Cette pratique fut importée d’Antioche à Milan par St Ambroise)

[3] Ensemble des mélodies en langue latine de la liturgie chrétienne d’Occident, identifié au "chant grégorien"

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Jean-Luc KUCZYNSKI
Jean-Luc KUCZYNSKI est compositeur et professeur de composition musicale depuis 1988 aux ACM et depuis 1999 à l’école d’écriture et de composition Polyphonies.
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